l’Académie du Royaume du Maroc organise un colloque international, les 19 et 20 juin 2019. au siège de l’Académie.
La séance d’ouverture aura lieu le mercredi 19 juin à 17H00
La conférence inaugurale sera présentée par M. Olivier Mongin, Penseur et Ecrivain sous le thème :
Les promesses non tenues de l’histoire méditerranéenne :
Pour une lecture croisée de Mohamed Arkoun et de Paul Ricoeur
La Méditerranée constitue toujours une espérance guidée par des utopies politiques, des intérêts économiques contradictoires ou par des volontés d’échanges et d’ouverture. Cette espérance se trouve, chaque fois, brouillée par des facteurs d’adversité qui empêchent les élans fédérateurs et les efforts de rapprochement de se réaliser. En effet, l’espace méditerranéen, dans sa pluralité, sa diversité et aussi dans sa complexité en tant qu’aire culturelle, parait être un espace insaisissable. Il y a une mosaïque de registres cognitifs qui se traduisent à travers les différents modes d’expression, de discours, de langages, et aussi dans les faits institutionnels, politiques, urbains et médiatiques. Reconstruire le concept de la Méditerranée suppose, certes, la compréhension des espaces qui produisent du sens, ou de nouvelles formes de sens comme il suppose l’interpellation des phénomènes de changement et de blocage. Comment peut-on repenser la Méditerranée, à partir d’un esprit de fidélité et d’interrogation sur les ouvertures et les idées d’un grand penseur maghrébin, en l’occurrence Mohammed Arkoun, à propos de ce qu’il a appelé « l’espace méditerranéen » ? Jusqu’à quel point ses ouvertures peuvent nous être utiles pour approfondir les débats actuels sur la Méditerranée ? Questions primordiales qui supposent un triple engagement : éthique, intellectuel et pragmatique. La dimension méditerranéenne ne peut aucunement être approchée sans, comme le dit si bien Arkoun, « l’étude des conditions de possibilités d’un remembrement intellectuel, spirituel, éthique et culturel de l’espace méditerranéen par-delà les fractures, les systèmes théologiques d’exclusion réciproque des communautés ». La Méditerranée est un espace d’échange, de passerelles et de communications comme elle est un théâtre de tensions, de conflits et de guerres. Et pourtant Arkoun reconnait qu’il n’a « jamais opposé une rive à l’autre ni en termes politiques, encore moins du point de vue religieux et culturel ». L’espace méditerranéen est toujours surdéterminé par une triple dimension, locale, régionale et mondiale. Conscients de l’importance de chacune de ces dimensions, il est temps de les interroger de nouveau à partir d’une approche qui se démarque des pesanteurs spatiales et du poids des historicités. Surtout que, selon Arkoun, « la culture importe (Culture does matter) dans la construction de tout sujet humain et dans le travail historique de soi sur soi par lequel chaque groupe, chaque nation produit son identité ». Il s’agira dans cette rencontre de questionner, à partir d’un texte inédit d’Arkoun, « le cadre cognitif dans lequel continue de fonctionner la pensée, la conceptualisation, le regard de tous les protagonistes tant euro-occidentaux, judéo-islamo-chrétiens, arabo-irano-turcs ». Car, et malgré les malentendus, les résistances et les différentes instrumentalisations politiques, il y a eu, et il y a encore, des formes variées de métissage, de convergence, de rencontre et d’interculturalité qui ne cessent de faire éclater les discours clos et les dichotomies illusoires. Afin de parvenir à cette fin, Arkoun nous invite à accomplir une double fonction : produire un discours critique qu’il définit « par trois verbes à l’infinitif : Transgresser, déplacer, dépasser », et faire appel à « une perspective prospective » pour répondre à un véritable « besoin de sens ».
L’Académie du Royaume du Maroc et l’IMÉRA vous invitent à un moment de réflexion collective sur l’apport théorique et politique de Mohammed Arkoun à partir de son texte inédit : « Penser l’espace géopolitique méditerranéen », avec la présentation d’interventions d’éminents intellectuels des deux rives qui ont toujours porté les grandes questions de la Méditerranée dans leurs pensées afin de réactiver ce « besoin de sens » pour lequel Arkoun a oeuvré durant toute sa trajectoire intellectuelle.